En qualité de rapporteur national indépendant, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) souhaite rappeler au gouvernement cet engagement international de lutter contre le crime odieux que constitue la traite des êtres humains.
En novembre 2021, les États membres des Nations Unies, dont la France, « [manifestaient leur] ferme volonté politique d’agir résolument et de concert pour mettre fin [au] crime odieux [qu’est la traite des êtres humains], où qu’il se produise. »
En qualité de rapporteur national indépendant, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) souhaite rappeler au gouvernement cet engagement international.
L’octroi, il y a un an, du statut de pays pionnier dans le cadre de l’Alliance 8.7, alliance mondiale pour éradiquer le travail forcé, l’esclavage moderne, la traite des êtres humains et le travail des enfants, la publication d’un guide de formation sur l’identification et l’accompagnement des victimes de traite des êtres humains, le plan national contre la prostitution des mineurs sont certes des avancées qu’il convient de saluer, mais elles ne cachent pas le désengagement manifeste des pouvoirs publics pour lutter contre ce fléau.
Absence de portage politique :
La mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF) est dépourvue d’une direction depuis quelques semaines sans aucune visibilité sur son remplacement.
Cette absence est d’autant plus inquiétante que le deuxième plan d’action national arrive à son terme, qu’aucune date n’est donnée pour la publication du 3e plan et qu’un flou entoure le processus d’élaboration de ce plan et les modalités de consultation de la société civile dans ce cadre. Un nouveau retard de plusieurs mois dans la publication du plan d’action national enverrait un message des plus désastreux, alors même que le Groupe d’experts sur la traite des êtres humains du Conseil de l’Europe (GRETA) et l’OSCE ont souligné les défaillances de la France.
Faiblesse des moyens financiers et humains dédiés
La CNCDH a systématiquement déploré l’absence d’une ligne budgétaire dédiée pour lutter contre la traite et l’exploitation des êtres humains.
Les fonds octroyés à la MIPROF sont en grande partie consacrés à la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes. Sans méconnaître l’importance et l’urgence de lutter contre ces violences, la CNCDH dénonce cet arbitrage budgétaire. Une des récentes conséquences de ces choix a été l’incapacité de la France à mobiliser tous les moyens nécessaires sur le terrain pour prévenir les risques d’exploitation des personnes fuyant l’Ukraine, à la différence d’autres pays européens.
Elle tient à souligner le professionnalisme et l’engagement des organisations de la société civile qui doivent pallier les défaillances de l’État.
Une mission interministérielle rattachée à la Première ministre
Alors qu’elle siège au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, la France doit montrer l’exemple.
Seul un rattachement direct d’une délégation interministérielle à la Première ministre enverrait un signal suffisamment fort aux acteurs nationaux et aux partenaires internationaux, et permettrait de garantir le caractère transversal de la politique de lutte contre la traite et de garantir que la traite est prise en compte sous toutes ses formes (sans être réduite à la seule exploitation sexuelle). Cette délégation doit bénéficier d’un budget et de ressources humaines dédiés.